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 Conte de la Citrouille Balafrée - Le houspilleur de la tour

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AuteurMessage
Aklatan
Capitaine des Plaines
Aklatan


Messages : 483
Date d'inscription : 04/07/2008
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Localisation : Collines de Sous-Voûte-Chêne, la maison à côté de la cascade, où un gnome taille parfois des pierres.

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MessageSujet: Conte de la Citrouille Balafrée - Le houspilleur de la tour   Conte de la Citrouille Balafrée - Le houspilleur de la tour Icon_minitimeDim 31 Oct - 10:58

C’était en un pays solitaire et enfoui dans la campagne. Cet endroit désert avait la grande chance d’offrir un auberge, plantée nulle part dans cette terre vide et verte.
Une liqueur rouge s’écoulait doucement dans le gosier de Califoin, jusqu’à l’épanchement. Son vin préféré !
Tout le monde le prenait pour un pèlerin. Bien que, du monde, il n’y en avait certes pas : un aubergiste, et deux bonnes gens qui ont du s’égarer en chemin.
« Et n’y a-t-il pas un coin paisible pour ranger ses bottes quelques temps ? » demanda Califoin.
Il avait oublié depuis combien de temps il avait pris la route, mais aimait à se dire que comme chaque serrure avait sa clé, tout voyage avait une trêve. Il est vrai que Califoin cherchait davantage la clé que la porte.
« Je vous dis, y a toujours cette petite tour, contre le gouffre de la plaine. Une bâtisse minable… Grande ; mais on croirait une cabane au fond d’un jardin, à l’endroit où se dresse. Elle a dû s’enfoncer dans son trou d’herbe avant que le monde porte des soutanes, ma parole…
- Ouais, elle est tombée à pic ! Hiargh hiargh ! » Ricanait le compère ivre.
« Tant qu’il n’y a personne, tout est bon à prendre. » déclara Califoin, ayant vidé son verre, et balançant son baluchon sur l’épaule.
« Bah, y a toujours ce vieux fantôme qui fait les cent pas sur son plancher moisi… Il n’aime pas trop les visiteurs, à ce qu’on dit, mais je crois qu’il serait content de se trouver un peu de compagnie ! »
Califoin médita un instant à ce détail, puis remercia ses informateurs sur une note insouciante :
« C’est ce que je pensais, il n’y a personne, donc ! »

Au bout de quelques deoctodiex à battre le sol herbeux d’un sentier inexistant à travers les bois, Califoin parvint à un terrain pentu, qui paraissait chanter toute la solitude de la région à sa seule contemplation. Le mot paraît fort, mais vaut le détour, comme cet tour isolée au fond de de la petite plaine qui se refermait sur elle-même.
Au bas de cette pente de hautes herbes se dressait une tour délabrée, mais dont le toit semblait encore suffisamment perméable ; elle était adossée, sinon enfoncée, dans la pierre d’un pan de colline plus vertical qu’un gibet, d’où saillaient les racines aventureuses qui s’échappaient du sol de la clairière surplombant le bord. Car, comme si la terre s’était enfoncée pour pousser paresseusement cette tour fluette jusqu’à sa surface, la courte falaise donnait sur un palier forestier, qui s’étendait au loin, à maigre distance du toit tordu de la bâtisse.
Percluse dans sa cuvette silencieuse, nichée dans un léger fossé dont les petits buissons secs s’accrochaient aux pierres grossières autour de l’entrée, elle était le bastion pittoresque de plus avisé des ermites : c’était ce que se préparait à être Califoin, et il descendit jusqu’à la tour sans la moindre hésitation, sans traînardise !
Très joyeux de découvrir sa nouvelle demeure, il aurait aimé frapper à la porte, de toute façon, nul n’était là pour le railler, ni pour l’inviter à entrer ; mais il entra avec grande précaution, de peur que la porte ne tombe en lambeaux de bois pourri.
Il fit un bref tour de la tour, qui n’était pas assez spacieuse ni meublée pour s’attarder sur chaque pièce. C’est donc sans rencontrer le moindre habitant qu’il trouva la chambre, où un lit, encore en état de porter le sommeil d’un occupant, trônait humblement. La nuit était tombée, il y tomba de même, et s’endormit.

Ce fût une voix grinçante qui l’éveilla à l’aube, sur ce ton :
« Dites-donc, levez-vous de là. C’est le lit dans lequel je dormais »
Quand Califoin ouvrit les yeux, il observa l’habitant supposé des lieux : quelqu’un de tout à fait normal, aux vieux vêtements poussiéreux, et dont le teint semblait quelque peu livide, sur tout son corps fébrile.
« Ah, et bien excusez-moi de l’avoir occupé sans votre permission. » répondit aussitôt Califoin. Et, avec tout le tact et la diplomatie dont il était capable au réveil, il lui demanda :
« Je crois savoir… que vous êtes résident potentiel de cette tour. » Il ne se vit pas répondre. Mais il s’en préoccupait assez peu, il voyait bien que c’était un fantôme, et s’en foutait royalement.
N’attendant pas d’autres réclamations de la part du « résident potentiel », il se leva pour descendre jusqu’au rez-de-chaussée. Mais il fut apostrophé par le fantôme, qui lui cria dans l’escalier :
« Ne mettez pas vos mains sur les murs ! »

Alors que Califoin était paisiblement assis à la table de la cuisine, en train de grignoter une pomme, dont la comestibilité le fascinait, l’ayant trouvée au fond d’un tiroir, il reçut de nouveau la visite de son « locataire » :
« Excusez-moi, mais vous mangez-là une des pommes que je mangeais moi-même. » Califoin reposa alors la pomme dans un soupir :
« Ca va, pardonnez-moi. » Fît-il sans autant se montrer offusqué. Il se murmura à lui-même que si l’ancien occupant ne devait pas avoir grand appétit, certainement avait-il seulement faim de ses richesses, qui ne se résumaient pour l’instant qu’à un bazar souriceau flétrissant sous des charpentes rongées et des meubles centenaires.

Au fur et à mesure que Califoin fouillait recoins et armoires de la petite tour, il découvrit plusieurs objets utilitaires, entre autres… Il eut même plaisir à trouver un luth, dans un état fort convenable, dont il pinça allègrement les cordes.
« S’il vous plaît, messire ! Veuillez reposer ce luth, c’est celui sur lequel j’avais l’habitude de jouer.
- Bon, très bien… De toute façon il sonne faux, cela doit faire une paye qu’il n’a pas été accordé ! »

Mais outre les pommes chétives et intouchables qui moisissaient dans la cuisine, la nourriture viendrait à manquer sous le nouveau toit de Califoin. Il entreprit donc de partir à la chasse, espérant que si les bonnes gens manquaient funestement dans la région, au moins y aurait-il quelques gibiers baladant leur épanouissement insouciant ! Il fut heureux de dénicher un arc flexible, dont le carquois contenait plusieurs flèches neuves. Mais avant de retourner vers la porte pour aller trouver la forêt, il fut intercepté par le fantôme, las et grisonnant, qui feintant l’autorité, réclama la tranquillité de ses biens, plus que celle de son âme :
« Mais que vois-je encore ? Sachez que vous emportez l’arc avec lequel je tirais. Et les flèches dont je faisais aussi bien l’usage !
- Ah, cessez-donc cela, vous ne chassez plus avec, à ce que je sache ? » Sans attendre la moindre réponse, qui évidemment ne vint pas, il referma la porte derrière lui.

La vie demeurait morne et tranquille, aux bords désolés de l’ermitage, dans la tour morose et silencieuse.
Un jour que Califoin se proposa de réparer quelques parcelles du toit tordu de la bâtisse, il escalada ses murs, sur une bien longue échelle, qui semblait en meilleur état que les tuiles elle-même. Mais bien entendu, il prit place sur ce sommet glorieux davantage pour contempler l’horizon plat où courait un vent calme, dont il partageait la solitude.
Ce fût dans ses rêvasseries perchées que le fantôme arriva de nouveau à son côté, sans manquer de le réprimander :
« C’est sur cette échelle que je montais et redescendais, c’est celle que j’utilisais ! N’y touchez plus ! »

Et plus nombreuses étaient les rappels à l’ordre du fantôme, plus grande était l’indifférence de Califoin à son égard ; car à chaque fois qu’il usait du moindre objet qu’il trouvait chez lui, le locataire livide le défendait de s’asseoir dans le fauteuil dans lequel il s’asseyait, la bougie qu’il allumait, le balai avec lequel il balayait, le tapis sur lequel il marchait...

Ma chère

La vie reculée est une chose honnête, que je ne regrette pas car il faut l’avoir apprivoisée pour s’en rendre compte. Tu avais peur que je m’ennuie ; sache qu’ici il n’y a ni peur, ni ennui.

Le seul ennui inopportun que je pourrais relever est ce foutrefiacre de fantôme de mes pauvres noix brisées par ce perturbateur qui m’empêcherait même de fourrer mes mains dans mes poches si…

« Vous écrivez avec la plume que j’usais pour écrire encore il y a peu ! Et il en de même pour cet encrier et ce parchemin dont je me servais moi-même ! » le surprit le fantôme en surgissant dans son dos. Califoin se retourna, irrité :
« Ha ! Mais je vais vous la rendre, cette plume ! Et je vous la passerai au travers du corps, tenez ! » rugit-il en tentant d’enfoncer la plume dans le vêtement du fantôme ; mais elle le traversa comme en fendant une brise figée.
« Et de quel droit vous reposez-vous donc sur le bureau sur lequel je me courbait aussi bien ? »

Califoin attrapa une bouteille de vin, parmi les crus poussiéreux qui s’alignaient sur le présentoir de la cave, et remontant les escaliers, il entendit maugréer derrière lui :
« Vous osez donc fouler l’endroit où je reposais jadis ? Vous grimpez les marches de mon propre caveau ? »
Il posa la bouteille de vin sur la table d’un geste furieux.
« Fou ! Il me rendra fou, ce damné d’ectoplasme ! Si c’est ce qu’on appelle un esprit frappeur, je pourrais bien y trouver un talent plus qu’équivalent ! »
Et cherchant la tranquillité qu’il connaissait bien à la solitude – et au vin – il prit un beau verre, dans lequel il versa la liqueur rougeoyante. Il se délecta de ce simple moment où il observait le récipient se remplir du doux nectar ; et songea :
« Et bien, s’il y a donc une chose que cet esprit me laissera faire, c’est de me servir de ses verres sales ! »
Il ne fût pas surpris de se voir dérangé une nouvelle fois, avant même de porter le verre à ses lèvres : du coin de l’œil, il aperçut le fantôme qui le regardait, accoudé à la jointure de la porte de la cave.

« Je suppose que vous aviez l’habitude de boire dans ce verre, de boire du vin même ! Il m’est interdit d’y toucher, c’est cela ? Mais je m’en fous ! » Et il avala plusieurs gorgées de l’aimable breuvage. A ces mots, le fantôme haussa les épaules, et répondit avec insouciance :
« Oh, pour ça, allez-y, moi aussi je m’en fous, maintenant. C’est le vin avec lequel je me suis empoisonné. »
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