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 Le vieux Creuliig

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AuteurMessage
Aklatan
Capitaine des Plaines
Aklatan


Messages : 483
Date d'inscription : 04/07/2008
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Localisation : Collines de Sous-Voûte-Chêne, la maison à côté de la cascade, où un gnome taille parfois des pierres.

Le vieux Creuliig Empty
MessageSujet: Le vieux Creuliig   Le vieux Creuliig Icon_minitimeSam 9 Oct - 8:19

Le vieux Creuliig était un vagabond. Mais il n’était ni un vagabond miséreux, ni un vagabond sauvage – quoi que sauvage, il l’eût été assurément – car il n’était ni bien pauvre ni un dépravé du pichet ; de toute façon tout cela ne signifiait pas grand-chose pour lui, ni pour personne, car Creullig n’intéressait personne. Et cela, il avait appris à bien s’en moquer, d’en rire à chaque fois plus fort lorsqu’une nouvelle occasion se présentait, si bien que, quand même il apparaissait dans toute sa sincérité, il oeuvrait à tromper et y jouer la farce.
Cela s’imposait tout seul, pour son plus grand détachement, comme pour une scène tout à fait commune sur la place d’un village, ou dans une échoppe :
« Mastraëm, votre fille a, ma foi, un minois des plus séduisants ! » s’adresse-t-il à une femme mûre assise à côté de sa fille. Celle-ci réplique alors, en succédant au fort joli mais impassible minois de la jeune fille :
« Et le mien alors ? Ne suis-je pas aussi belle ?
- Mais certainement, ce que j’admire ; bien sûr je devinais que cela allait de soi en ayant fait cette belle enfant ! » renchérit-il avec superbe galanterie, sur le ton léger et gracile qui font le charme des hommes courtois.
« C’est pourtant bien ce que je me suis retenue de penser en vous voyant, ayant connu vos parents. » lui rétorque la dame avec aigreur. Le vieux Creulliig s’éloignait sans pouvoir étouffer son rire, sa farce élaborée pour se montrer d’autant plus cocasse qu’il n’était pas surpris le moins du monde. C’était le seul intérêt qu’il avait finalement apprécié que le monde lui porte, et il s’en contentait malicieusement.

Il lui arrivait souvent de se promener dans les rues de tout patelin, toute bourgade ou cité, sans jamais se soucier des gens alentours, qui jamais n’oseraient se soucier de lui, même si les nuages devaient avancer à l’aide de gros souliers de plomb. S’aventurer où bon lui chantait relevait de l’évidence, pour un vagabond comme le vieux Creulliig ; et il aimait autant s’élancer à travers la campagne en sermonnant de n’en jamais revenir, et puis d’en sortir à nouveau quelques temps plus tard, juste histoire de rigoler. Cela dit, comment sort-on de la campagne ? Le monde est une campagne ! A vrai dire, il existe des lieux propices à l’élevage de pigeons sauvages, souvent appelées villes, ce sont là d’ailleurs les endroits les moins fréquentables, mais de cela Creulliig s’en fichait bien aussi, on ne se préoccuperait pas plus de lui par ici, fût-il en enfer !
Là où les gens marchaient gravement et solennellement – et rapidement – au milieu des pigeons qui se baladaient comme dans une basse- cour à la recherche de grains à picorer, Creulliig s’étonna de ne point être un pigeon : en effet nul ne se souciait de toute cette volaille qui malgré tout crottait les murs blancs de leurs « splendides architectures ».

Il avouait que même si les bâtiments avaient été plus splendides que la fille de la vieille femme, cela n’aurait pas été aussi amusant de converser galantement avec de la pierre brute.
Le vieux Creulliig revînt une nouvelle fois de la campagne – d’où un jour « il faudra bien qu’il ne revienne pas, que diable ! » - mais en bonne compagnie ! Compagnie qui ne trouvait pas autant d’intérêt à Creulliig que lui-même pour elle, il arriva au milieu des pigeons avec… une poule.
Quelle ingénieuse idée que de recréer une basse-cour géante, dans toute cette cité volatile ! Il est vrai qu’une volaille supplémentaire ne devrait pas changer les citadins des multitudes de pigeons qu’ils manquaient de piétiner tout le long de la rue, mais il voulait tout de même voir le miracle se produire.
Il ne fallût pas longtemps pour que tous observent l’animal d’un regard médusé, que les plus ébahis s’arrêtent pour contempler la bête se déplacer et batifoler… Jusqu’à même voir certains se lancer à sa poursuite pour l’effrayer, l’attraper, la plumer, ou pire :
« Oh ! Regardez ! Avez-vous vu comment elle marche ? Et ses pattes, et son bec ! »
Les pigeons avaient de quoi mourir de jalousie pour leur cousine.
Et c’est à nouveau en s’esclaffant que le vieux Creulliig quitta les lieux, réalisant à la fois qu’il ne pouvait être un pigeon, et que ce n’étaient pas les pigeons eux-mêmes qui rencontraient un intrus dans leur assemblée, c’était toute l’assemblée de pigeons de cette ville médiocre ! Creulliig laissa les passants se passionner pour la volaille, avec beaucoup plus d’intérêt que pour lui-même, en fin de compte. Mais comme nous l’avons dit, le vieux Creullig s’en moquait bien.
A ce propos, il aimait sermonner pour lui-même, vagabondant sur les chemins :
« Nul n’a besoin qu’on s’intéresse à soi, ils préfèrent qu’on les regarde en feintant ignorer que toutes les pensées qui nagent derrière ces yeux songent au prochain repas, aux déboires du cale-bute, ou même dissimulent un être endormi. Mais on les regarde, et ils s’en contentent. Pauvre monde, si seulement il savait que sous mes braies légères, je suis à poil ! Il ne le saura pas, il se contentera de regarder sans rien voir ; et je lui donnerai du fer du fer à retordre puisqu’il ne m’a même pas encore regardé ! » Et oui, le monde se verra bien tout entier en posant un seul regard sur le vieux Creullig le vagabond.

Au cours d’une de ses nombreuses pérégrinations, le vieux Creulliig, qui cheminait lentement dans une vaste clairière, arriva à un trou. Une ouverture enfouie entre les feuilles, qui devait révéler un puits, au fond duquel une minuscule lueur semblait briller. Mais il flaira quelque chose cependant, avant même de s’y attarder, quelque chose d’encore plus drôle, dont il aurait tant et tant à se moquer, encore une fois.
Faisant mine de ne pas avoir le temps de s’y intéresser cet après-midi, le vieux Creulliig continua son chemin, laissant derrière lui ce qui aurait pu être la plus grande découverte de l’existence toute entière.
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