Sermias était la progéniture d'un riche cultivateur, en des temps maintenant éteints. Ce négociant vendait une herbe très spéciale qui avait le pouvoir de rendre les gens heureux; son commerce était fleuri, et il tenait beaucoup à ses précieuses récoltes, lui tenant compagnie l'été et chaud l'hiver.
Lorsque son fils Sermias apprît à jouoer du clavecin pour la première fois, son père voulût qu'il écrive une ode à son herbe. C'est ce qu'il fît, ainsi, son père aimait entendre chaque soir la merveilleuse aventure qu'était le métier de cultivateur, et les exploits qu'il en tirait, à travers cette chanson, fredonnée avec tant de singuliarité par son fiston.
Seulement un jour, alors qu'ils dînaient en famille, Sermias désobéît à son père en reprenant plusieurs fois du gigot, alors que son père lui interdisait, radottant qu'iln fallait conserver la nourriture pour les jours à suivre car l'hiver approchait. Sermias fût envoyé au fond de la grange en guise de punition ; grange dont il parvînt à s'échapper en rongeant la corde (car le gigot était au citron, ave l'acidité de sa bouche, la corde fondît comme du beurre sur le rocher de midi) qui l'attachait. Mélancolique, il s'en alla sur les chemins du crépuscule en fredonnant sa composition. En arrivant en ville, les passants très enjoués par l'air de musique du jeune Troubadour l'invitèrent à le jouer en public. Puis il fût introduit au sein d'une auberge qui lui permettait de revenir autant que possible pour chanter et jouer en échange d'un pichet et pourquoi pas de gigot au citron.
Seulement, au fur et à mesure de ses allées et venues en ville, il se rendît compte que les gens profitant de sa musique n'y voyaient rien d'implicite.
Il se trouva désemparé le jour où la garde régionale vînt jeter le père de Sermias dans aux cachots pour vente de matière illicite.
Ainsi, il dût assurer l'entretien de la maison familiale avec sa mère, en l'absence de son père qui pourrissait dans les geôles d'un donjon inconnu. Malheureusement, sans ressources, la survie s'avérait impossible. La mère de Sermias dût trouver du travail à l'auberge, s'y installer en quittant le logement, et travailler comme serveuse tandis que son fils jouait en public pour gagner quelques sous, ou bien une miche de pain. Ils parvînrent à subsister ainsi quelques années, le Troubadour atteignît un âge... où il avait grande envie de se rebeller !
Délaissant son piano sur une ultime fausse note, en pleine audition dans l'auberge, il hurla au changement, à bout de force de répéter sa chanson :
"Du changement ! Les vieilles choses au fond du trou ! Les dagues réaffûtées !" Et dans la masse, trois personnes levèrent le poing avec lui, trois troubadours. Sermias, anxieux, murmura à un garde s'il ne pouvait pas les encourager ; il se vît répondre:
"Ca ne tient qu'à vous de me demander de le faire, car la peine de votre père augmente d'une semaine à chaque fois que vous commencez à chanter la chanson qui l'a mit au trou !"
C'est ainsi qu'avez les Troubadours des Plaines, il partît sur les chemins pour composer de nouveaux hymnes, et découvrir des horizons meilleurs, avec la quête intime de faire libérer son paternel en décapitant pièce par pièce la récurrente ode à l'herbe magique qui avait construit la forteresse de l'oubli au fond de laquelle avait fini par se morfondre son père. Les Troubadours jouèrent donc dans différentes bourgades, des foires, au pied des cascades et au sommet des collines, pour faire valoir de nouvelles couleurs, de nouveaux chants, et d'autres appels à la liberté !
... Et il sembla que Sermias oublia son père au bout d'un certain temps. D'innombrables semaines sur les routes, ça épuise les pattes et ça fait changer d'air, si en plus il faut penser aux emmerdes...
Et voici comment le Troubadour Sermias Brikbinzelle rejoignît le clan des Troubadours, brandissant fièrement le drapeau de la musique libre, et du chant d'appel au changement ! A commencer par celui de nouvelles bottes !